L’origine de la Roma Norte, « la plus belle fleur du Porfiriato[1] » selon Manuel Perló Cohen, Docteur en Planification urbano-régionale, remonte à 1903. Son nom vient des pâturages de la Romita sur lesquels le quartier s’est développé.
Inscrite dans la prolongation de la Cuauhtémoc et de la Juárez, la Roma Norte se distinguait néanmoins de ses voisines par un urbanisme inspiré de la tradition française avec ses amples avenues bordées d’arbres, ses places et ses espaces verts, allié aux dernières innovations en termes de pavement, éclairage électrique et systèmes de canalisation.
Le Porfiriato fut une époque marquée par les influences européennes de Porfirio Díaz, en particulier françaises, et tant l’architecture que l’aménagement urbain de la Roma sont la représentation d’un pouvoir politique qui cherchait alors à élever le Mexique au rang de la modernité.
Une autre particularité de la Roma Norte reposait sur sa composition sociale avec d’une part la construction de maisons commandées et auto-financées par quelques-unes des familles les plus riches de Mexico, et d’autre part des personnes d’un niveau socio-économique moins élevé qui dépendaient du crédit immobilier octroyé par la Banque américaine et la Compagnie des terrains de Calzada de Chapultepec. Ainsi, dès ses débuts, la Roma accueillit une population plus hétérogène que ses quartiers voisins comme la Condesa.
Si la Roma Norte trouve son origine dans le Porfiriato, son histoire se poursuit cependant bien au-delà. Sa consolidation intervint après la révolution mexicaine et c’est ainsi que l’on peut dire que le quartier est le fruit d’une fusion entre deux époques historiques marquées par la rupture. Manuel Perló Cohen écrit : « D’une certaine manière on peut dire que la Roma est la petite orpheline du Porfiriato que la Révolution adopta comme sa propre fille. » C’est suite à la révolution qu’apparurent de nouvelles tendances architecturales ainsi que des immeubles d’appartements destinés aux professionnels de la classe moyenne aisée tels que les édifices Balmori ou Francia. Vers 1940, la « colonia » commença à accueillir des Mexicains en provenance d’autres Etats, en particulier du sud, et ce sont ces mouvements de migration interne qui permirent l’essor de nouveaux commerces. C’est à cette même époque que se multiplièrent les « cantinas », salons de danse et maisons closes mais aussi maisons d’étudiants et familles de gitans.
La Roma Norte que l’on connaît à l’heure actuelle tient plus de son évolution dans les années 90, décennie durant laquelle se sont développés les restaurants et lieux culturels. Aujourd’hui, la Roma Norte apparaît comme un quartier arty et hipster avec ses nombreuses librairies de livres anciens, galeries d’art, boutiques de meubles vintage et de créateurs.
Enfin, la Roma Norte est aussi un véritable couloir gastronomique avec une multitude d’options pour tous les budgets, allant de la street food aux restaurants de grands chefs.
[1] Le Porfiriato se réfère au long mandat du Général Porfirio Díaz qui gouverna le Mexique entre 1876 et 1911, soit un peu plus de 30 ans.
* Alvaro Obregón : avenue longue de 45 mètres, elle possède un ample passage piétonnier bordé de part et d’autre par divers commerces comme c’est le cas de certains quartiers parisiens.
* La place Rio de Janeiro : elle possède une réplique de la sculpture du David de Michel-Ange en son centre et est connue pour son Edifice Rio de Janeiro dit « Casa de las Brujas » qui signifie « Maison des Sorcières ».
* L’édifice Rio de Janeiro : c’est l’œuvre de l’architecte britannique Regis A. Pigeon date de 1908. Porfirio Diaz ordonna sa construction dans le cadre des célébrations du Centenaire de l’Indépendance mexicaine.
Originellement hôtel de luxe, le bâtiment devint ensuite résidentiel et a pour particularité de mélanger différents styles architecturaux : principalement victorien et gothique à l’extérieur et Art Déco à l’intérieur suite à sa rénovation.
La légende raconte qu’à la moitié du XXe siècle, l’un des appartements était habité par Barbara Guerrero, plus communément connue comme la Pachita, « chamane officielle » de divers personnages de la vie publique du pays. Des voisins de l’époque auraient rapporté que la Pachita réalisait des rituels où elle invoquait les esprits et qu’elle déambulait dans les couloirs du bâtiment en faisant des bruits étranges.
Mais il est plus probable que le nom de « Casa de las Brujas » soit le fruit de son architecture victorienne. Le bâtiment possède un frère jumeau dans le quartier voisin de la Juarez au croisement des rues Berlin et Versailles.
* La Casa universitaria del libro : inaugurée en 1929, la Maison universitaire du livre appartient aujourd’hui à la UNAM (Université nationale autonome du Mexique) qui est l’université publique la plus grande du pays.
Demeure des époux Don Joaquín Baranda McGregor et Doña Dolores Luján Zuloaga, la maison fut considérée comme novatrice car elle possédait un demi sous-sol, un ascenseur et un système de double drainage qui permettait de séparer les eaux noires et eaux de pluie.
En 1945, Dolores Luján, alors veuve, vendit la résidence au Centre Asturien de Mexico qui y développa ses activités sociales et culturelles. Puis en 1951, un bâtiment de cinq étages fut érigé dans le jardin afin d’abriter une bibliothèque, une salle télé et une nouvelle salle de réception.
Lorsque le Centre Asturien déménagea dans le quartier de Polanco en 1985, le bâtiment demeura à la disposition du Conseil d’administration qui signa avec la UNAM un contrat de prêt de 10 ans, cédant à l’université l’usage de la maison. C’est ainsi en 1986 que fut formellement inaugurée la Maison Universitaire du Livre.
Aujourd’hui, il s’agit d’un lieu de diffusion culturelle avec différents ateliers, conférences, tables rondes, soirées ciné…
* La place Luis Cabrera : construite dans la prolongation de la place Rio de Janeiro et néanmoins moins imposante, elle est entourée de bars et cafés. Avec une fontaine en son centre, elle est le rendez-vous des chiens et de leurs maîtres.
* La Casa Lamm : cet édifice emblématique de la Roma Norte est l’œuvre de son propriétaire, Lewis Lamm, et sa construction remonte à 1911. Mais la famille Lamm n’y résida finalement jamais et la propriété fut louée aux Frères Maristes qui en firent un collège pour garçons.
Plus tard, la résidence fut acquise par la famille García Collantes qui l’occupa jusqu’en 1990 et l’épargna de la destruction. En effet, plusieurs bâtiments tombaient à l’époque entre les mains de constructeurs indifférents à leur valeur historique et au patrimoine architectural.
Aujourd’hui la Casa Lamm est un Centre Culturel et une Université d’art et de littérature. On y trouve des cursus allant de la licence au doctorat, des cours et ateliers ainsi qu’une galerie d’art.
* L’édifice Balmori : autre édifice emblématique du quartier dont la construction remonte à 1922 et œuvre de l’ingénieur Ignacio Capetillo y Servín, le Balmori fut sauvé de la destruction en 1990 grâce à un collectif d’artistes. En effet, pendant plusieurs semaines, le collectif occupa le bâtiment afin d’éviter sa démolition en vue d’y établir un supermarché.
La « toma del Balmori » – qui signifie la prise du Balmori – se transforma en véritable manifestation artistique puisque, tout en préservant la façade de l’édifice, les artistes peignèrent directement dans le bâtiment et sur les fenêtres. L’art devint soudainement accessible à tous, dans l’espace public, et cette manifestation permit à un certain nombre d’artistes de se faire connaître.
C’est à cette époque que la Roma Norte qui avait souffert du tremblement de terre de 1985 récupéra un nouveau souffle et se transforma peu à peu en ce qu’elle est aujourd’hui : un quartier arty avec beaucoup de galeries d’art et boutiques indépendantes.
* Les rues Colima, Tabasco, Tonalá et Orizaba : ce sont les rues les plus esthétiques (opinion totalement subjective) de la Roma Norte. On y trouve beaucoup de maisons porfiriennes.
* Casa Colima : maison d’hôte dans une maison porfirienne de la rue Colima. C’est une option économique agréable et très bien située.
* Nima Local House : voisin de la Casa Colima, hôtel boutique également situé dans une maison porfirienne.
* La Valise : le luxe version intime dans la rue Tonalá, perpendiculaire à la rue Colima. Également situé dans une maison porfirienne, La Valise est une oasis urbaine avec un design unique.
* BrickHotel : le luxe version hôtel traditionnel. La décoration est moderne minimaliste et l’hôtel dispose d’un bar, restaurant, rooftop et spa.
* Casa Ignacio : hôtel boutique un peu plus excentré, situé dans la rue Jalapa, la Casa Ignacio bénéficie d’un grand patio avec des chambres à la décoration contemporaine. Chacune a pour thème une couleur.
*Casai : appartements disponibles dans tout Mexico. Différent d’Airbnb car les standards en termes d’aménagement, équipement, propreté et design sont beaucoup plus élevés.
Et encore d’autres options : Casa Goliana, Hotel Boutique Roma 191, Sonder Casa Tonalá.
Boulangeries
* Panaderia Rosetta : c’est une institution dans le quartier dont la chef, Elena Reygadas, est également aux commandes du restaurant gastronomique Rosetta situé dans une maison porfirienne de la même rue ; on y va pour l’originalité des viennoiseries : roll de guayaba, cardamomo, ricotta y limón, envuelto de estragón ou encore bollo de romero…
* Pâtisserie Dominique : boulangerie-pâtisserie tenue par une Française située dans la rue Chiapas. Il est agréable d’y prendre un café (ou un petit-déjeuner plus copieux) car les tables sont installées sous de hauts arbres.
* Bou : je ne recommande pas forcément d’y manger mais c’est là que se trouve le meilleur pain au chocolat de Mexico (avis 100% subjectif).
Cafés
* Eno : on y va pour un petit-déjeuner mexicain avec des ingrédients frais et de qualité. Mention spéciale aux chilaquiles et au toast avec son « huevo enmarcado », c’est-à-dire incorporé à même la tranche de pain.
* Camomila : idéal pour faire du télétravail avec un excellent rapport qualité-prix. C’est bon et pas cher.
Bars à vin
* Vigneron : bar à vin décontracté avec de bons petits plats cuisinés dans une micro-cuisine. Les vins proposés sont principalement français.
* Simone : il s’agit d’un bar à vin national avec des vins 100 % mexicains. Il est possible d’accompagner son verre avec des tapas, pizzetas, etc…
Restaurants
* Nueve Nueve : lové dans le jardin de la Casa Lamm, le Nueve Nueve met à l’honneur la gastronomie mexicaine dans un cadre élégant. Les tacos de pato en mole, la sopa de tortilla, les empanaditas de cochinita pibil et l’aguachile de filete ne sont que des exemples de ce que l’on peut y déguster.
* Casa Virginia : dans une maison porfirienne (oui, encore !) et un cadre minimaliste, Casa Virgina sert une cuisine fusion franco-mexicaine gourmet. La propriétaire, Monica Patiño, est Mexicaine tandis que le chef, Corentin Bertrand, est Français. C’est sûrement mon coup de cœur avec le Nueve Nueve.
* Huset : sous un ciel de feuillage et de guirlandes lumineuses, on y déguste un menu méditerranéen avec des produits de qualité.
* Meroma : il s’agit également d’un menu méditerranéen mais d’ordre gastronomique. Le dessert « natilla de cacao », qui est un crumble de chocolat servi avec un caramel de fruit de la passion et un sorbet coco, est à tomber.
* Rosetta : le restaurant appartient à la chef Elena Reygadas, qui est aux commandes de la Panadería Rosetta (mais aussi Lardo et Pizzeria Lardo), et sert une cuisine fusion italo-mexicaine. C’est gourmet et le cadre est sublime.
* Blanco Colima : voisin de Rosetta, le Blanco Colima impressionne par l’architecture de la maison, son cadre élégant, minimaliste et ses moulures. Le menu est varié et même si c’est de bonne qualité, c’est tout de même cher pour ce que c’est.
Huset, Meroma, Rosetta et le Blanco Colima se situent tous dans la rue Colima qui est un véritable couloir gastronomique.
* Galanga : c’est un restaurant thaïlandais, là encore établi dans une maison d’époque.
* Gaia : c’est une chaîne de magasins de meubles et décoration nationale qui a vu le jour en 2014. Son fondateur, Philippe Cahuzac, est français mais l’entreprise est bien mexicaine et presque l’intégralité des meubles est fabriquée au Mexique. Au début 100 % e-commerce, Gaia a commencé à ouvrir des boutiques deux ans plus tard. Son facteur de différentiation : des meubles avec un design moderne, produits localement, et accessibles pour les jeunes en situation de premier emploi et en phase d’indépendance.
Pour l’anecdote, je tiens à préciser que lorsque je suis arrivée au Mexique, il y avait très peu d’offre en termes de mobilier. Il fallait aller dans des grands magasins très chers avec des designs « anciens ».
* La Contra Roma : boutique de vins mexicains, principalement de la Valle de Guadalupe située au nord de la Baja California mais pas que.
* Graminea : tout est “a granel”, c’est-à-dire en vrac. On trouve un peu de tout : farines, graines, noix, pâtes, quinoa, lentilles, céréales, granola, pépites de chocolat, épices…On évite ainsi le gaspillage d’emballages plastiques.
* Mercado de chacharritas: on y trouve des meubles anciens époque Mid-century. Il arrive que le lieu propose également des répliques.
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