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Le choix en expatriation – Récit d’un projet avorté


Pour ceux qui connaissent le blog et me suivent depuis un moment vous vous souvenez sûrement que je m’étais engagée il y a désormais deux ans dans la Licence Humanités à distance avec l’université de Nanterre. Pour ceux qui sont nouveaux ici ou qui auraient besoin de contexte, je parlais de ce projet dans les articles suivants : L’expatriation, source de projets et L’expatriation : et si c’était une opportunité pour se réinventer ?


Il s’agissait d’un projet personnel dans lequel je me suis lancée par envie et non dans une optique professionnelle, dans la mesure où d’une part, je suis déjà titulaire d’un Master, et d’autre part les Humanités, comme beaucoup l’auront sûrement remarqué, ne sont pas « porteuses » professionnellement. J’avais envie de me « reconnecter » avec mes racines, avec ma langue et tout simplement de m’enrichir culturellement.


Dès le début la difficulté a été de me rendre deux fois par an à Paris pour présenter les examens de semestre. Si les cours sont à distance, les examens sont bien en présentiel. Je me souviens que pour le premier semestre, la faculté faisait face à des blocages car nous étions alors en pleine période des gilets jaunes. Bien que j’ai pu passé l’ensemble de mes épreuves, j’ai été « bloquée » quatre semaines en France, car au lieu de regrouper les examens sur deux semaines continues, ils étaient interrompus par les deux semaines de Noël.

Certains étudiants à distance mais résidant en France pouvaient faire des aller-retours en train, en revanche, pour ceux vivant à l’étranger nous n’avions pas d’autre option que de rester. Or qui peut donc se permettre de prendre quatre semaines de congés continues ? En ce qui concerne le second semestre, ça posait moins de problèmes car cette fois, les épreuves étaient regroupées.


L’autre difficulté qui est vite apparue est que certains enseignants refusaient qu’on leur envoie les devoirs par mail ou qu’on les dépose sur la plateforme en ligne : ils exigeaient la voie postale. Or envoyer de simples documents via UPS, DHL ou Fedex du Mexique (indispensable si l’on souhaite que le courrier parvienne à destination) coûte environ 50 euros…C’est tout de même surprenant qu’au XXIe siècle on exige encore des devoirs par voie postale…en particulier lorsqu’il existe bien une plateforme d’enseignement à distance.


Malgré ces obstacles j’ai validé ma première année avec mention et me suis engagée dans la seconde. C’est là que les choses sont devenues plus compliquées.


Le campus de Nanterre


J’ai lancé mon entreprise au Mexique (voir les articles Lancer sa boîte au Mexique à l’aube d’une pandémie et Entreprendre au Mexique) et je me suis vue moins disponible pour travailler mes cours régulièrement. En outre, je ne pouvais pas me permettre financièrement de me déplacer à nouveau en France deux fois dans l’année et je projetais donc de présenter l’ensemble des examens en mai, c’est-à-dire faire la session du second semestre ainsi que celle de rattrapage du premier semestre. Et puis une pandémie est arrivée...

Je ne peux nier à cet égard que l’université a pris des mesures et que tous les examens de mai ont été organisés en ligne. De mon côté, je ne les ai pas présentés parce-que je menais deux challenges de front : gérer ma boîte face à la pandémie et terminer la traduction d’une biographie historique pour laquelle j’étais rémunérée et qui était donc prioritaire (voir Anecdote expatriée : ma traduction d’une biographie historique à propos de Charlotte de Belgique).


À ce moment, je projetais donc de redoubler et de me réinscrire en deuxième année. Mais en réalité, j’ai pris conscience qu’il m’est trop difficile de voyager en France à raison de deux fois par an et qui plus est quatre semaines en période de fêtes de fin d’année. S’ajoutent à cela les incertitudes générées par la pandémie de COVID-19. Je me suis donc rapprochée de l’université afin de savoir si elle comptait poursuivre les examens en ligne, comme elle l’a fait en mai et juin dernier, or elle n’est pas en mesure de m’offrir une quelconque garantie. À l’heure actuelle les dirigeants de la faculté ont prévu un retour des étudiants le 20 septembre prochain mais ne cachent pas que la situation peut changer à tout moment. Il est donc impossible de prédire si les examens du premier semestre en décembre seront en présentiel ou à distance si les effets de la pandémie poussent de nouveau l’université à restreindre le flux de personnes sur le campus.


Je pourrais me réinscrire en me disant que je verrais bien. Or les frais d’inscription combinés aux cours à distance, à la BU et au CROUS (alors que je ne bénéficie d’aucun service du dit CROUS dans la mesure où je suis étudiante à distance mais que je suis quand même forcée de payer) s’élèvent à près de 500 euros…C’est en définitive une somme que je ne suis pas prête à payer si je ne suis pas certaine de pouvoir présenter les examens dans la mesure où je dispose déjà des cours. Si je découvre que les examens auront finalement lieu en ligne, je serais bien-sûr profondément déçue mais dans le même temps je suis forcée de prendre une décision et à cet égard de prioriser les choses.


J’ai lancé une entreprise qui peine à réellement démarrer à cause de la pandémie. Le PIB du Mexique a tout de même chuté de 18,7% et le peso s’est fortement dévalué : un article sur la situation économique actuelle du pays est en cours d’écriture et sera bientôt disponible sur le blog. Je dois donc me concentrer sur le développement de ma boîte (la faire survivre sera déjà un exploit en soi) et si je parviens à trouver un travail à côté, qu’il s’agisse de missions temporaires ou d’un contrat sur du plus long terme, je serai alors en mesure de réinvestir immédiatement dans mon projet. C’est simple : j’ai besoin de fonds. Dans le même temps, je n’ai pas pris de congés depuis mai 2019 et je commence à saturer. Je ne sais pas encore si je serais en mesure de voyager en octobre prochain (Andy et moi avons un voyage prévu de longue date) et mille idées se bousculent dans ma tête. Cela fait environ deux mois que j’ai perdu le sommeil et après cinq mois de vie en circuit fermé (voir La vie à Coronalandia) je commence à me sentir asphyxiée. Enfin, autre détail qui peut sembler mineur mais qui n’a pas été sans conséquences : j’ai dû m’acquitter de frais dentaires conséquents.


Je ne sais pas de quoi demain sera fait mais face aux incertitudes il vaut tout simplement mieux être prévoyant et ne pas perdre de vue l’essentiel. Chaque étudiant est bien-sûr responsable de lui-même mais je dois admettre que le peu de considération de l’université à l’égard des étudiants à distance a bien-sûr influé dans ma décision. Aujourd’hui je suis déçue et garde encore un goût amer mais je sais que j’ai pris la bonne décision, celle qui s’imposait, celle qui devait être prise et que j’ai laissé « traîner » durant l’été. Parfois, il faut tout simplement savoir faire des choix et ne pas perdre de vue ses objectifs, en particulier dans un contexte de crise économique. Amélie Nothomb a écrit : « Le seul mauvais choix est l’absence de choix. »


Aujourd’hui c’est un peu comme faire un deuil, aujourd’hui c’est un peu comme dire aurevoir à quelqu’un. Aujourd’hui c’est juste une page qui se tourne.

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